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Interview de Christian Papazoglakis, à propos de 24 Heures du Mans : Anthologie Sixties

Couverture de la BD 24 Heures du Mans : Anthologie Sixties

Découvrez les coulisses de la bande dessinée 24 Heures du Mans : Anthologie Sixties, parue aux éditions Glénat, en lisant l'interview de son auteur, Christian Papazoglakis.

Anthologie Sixties est composée de plusieurs histoires, retraçant diverses époques et thématiques. À chaque fois 48 planches + des feuilles d'engagés et des dessins de coupe des voitures engagées. Sont-ce des histoires nouvelles créées en une fois, ou une reprise d'histoires déjà éditées en trois tomes ? Pourquoi ces trois histoires qui feraient trois BD sont-elles sorties en un seul tome ?

Ce livre n'est pas une nouveauté, c'est un recueil qui reprend trois albums existants qui se concentraient chacun sur une période : 61-63, 64-67, et 68-69, ce qui permet de couvrir toute la décennie. Il ne s'adresse pas aux collectionneurs ou aux fidèles de la série, c'est un album de 160 pages, un peu plus petit, vendu au même prix que les albums de 48 pages, qui vise un public plus généraliste et qui permet d'ouvrir la collection à un nouveau lectorat. Seul le dessin de couverture est inédit.

Vous disiez dans l'interview sur 24 Heures du Mans 100 ans d'innovations, préférer le travail traditionnel au travail numérique. Avez-vous réalisé Anthologie Sixties de la même manière que 100 ans d'innovations ?

logiquement oui, puisqu'il s'agit des mêmes albums compilés et ré-édités.

Combien de temps avez-vous mis à dessiner ces trois histoires et les pages intercalaires ?

On compte en général 2 ou 3 mois pour le scénario et 7 à 8 mois de dessin par album, multiplié par trois puisqu'il y a trois albums. Ils n'ont pas été réalisés dans l'ordre chronologique, le chapitre 64-67 était le premier album de la série 24 H, puis on a fait le « 68-69 », avant de traiter d'autres périodes des années 20 et 50, puis la sortie du chapitre 61-63 en 2021 a été un peu éclipsée par le confinement et l'absence de promo.

Vous signez le dessin et co-signez couleur sur 1961-1963 : Rivalités italiennes. Vous co-signez le dessin et co-signez la couleur pour 1964-1967 : Le Duel Ferrari-Ford. Vous co-signez le dessin pour 1968-1969 : Rien ne sert de courir…, sans travailler sur la couleur. Est-ce une question de temps qui a fait que vous avez dû “déléguer” de plus en plus de travail au fil des histoires ?

À l'origine, Robert et moi devions nous charger de la couleur nous-mêmes, mais ça s'est révélé plus lourd et compliqué que prévu. Tanja a commencé à nous donner un coup de main, avant de prendre en charge cette partie à 100 %. C'est une façon plus cohérente de travailler, Tanja a plus de contrôle sur son travail, et Robert et moi pouvons consacrer plus de notre temps au dessin, chacun fait à plein ce pour quoi il est le plus efficace.

Cet album est aussi l'album de la période la plus mythique des 24 Heures du Mans, celle des Ford GT40 et du duel Ferrari-Ford de 1966, qui a d'ailleurs fait l'objet d'un film Le Mans 66, avec Matt Damon et Christian Bale. Dans la BD, l'approche est différente du film, on relève même quelques différences. Afin de clarifier les choses pour les lecteurs et spectateurs, quelle est la vraie version ?

Probablement aucune des deux puisqu'on a dû — comme les scénaristes du film — romancer l'histoire, la résumer, et remplir les vides. Les témoignages d'époque sont souvent contradictoires. Mais le travail de Denis Bernard colle tout de même beaucoup plus à la réalité que le film qui est sorti plusieurs années après notre album et qui est une sorte de fantaisie autour du même contexte. On voit par exemple Christian Bale écouter la course à la radio en bricolant dans son garage alors que son personnage a mené une bonne partie de la course cette année-là.

Page 131, vous créez une photographie d'époque, dédicacée, avec les pilotes Lucien Bianchi et Pedro Rodriguez, ainsi que le directeur de l'équipe Ford, lors de la victoire Ford en 1968. Est-ce une photo qui a existé, ou l'avez-vous inventée pour la bande dessinée ?

Je n'en ai pas de souvenir, non, je pense que c'était juste une figure de style pour gérer la transition entre le flash-back de 1968 et le retour à la course de 1969.

Quelle a été, dans cet album, ou dans chaque histoire de cet album, la voiture que vous avez préférée et pourquoi ?

Au début de la décennie, les Maserati sont très impressionnantes par leur inventivité : les birdcage et leur châssis en treillis, puis les Tipo 151 qui ressemblent à des chars d’assaut avec des proportions plus exubérantes que les Ferrari. La Ferrari P3 qui arrive en 66 est par contre une des plus belles voitures de course, surtout comparée aux premières Ferrari à moteur arrière dont les proportions étaient vraiment gauches. À la fin de l'album, la GT40 est un bel exemple des monstres créés uniquement pour être efficace dans les Hunaudières lorsque le règlement permet à peu près tout et qui trouvera son apogée en 1970 avec la Porsche 917 dont on voit les premières versions en 69.

Avez-vous une anecdote relative à cet album ?

Denis Bernard crée dans les premières pages une rencontre entre Masten Gregory, son épouse Seda, et Paul Frère, qui servent de témoins pour faire entrer le lecteur dans l'histoire. Cette rencontre est fictive, mais Denis a pu rencontrer plusieurs fois Seda à Paris, qui lui a confié des détails et des anecdotes avec beaucoup d’enthousiasme. Seda Gregory a validé le travail de Denis en acceptant très aimablement d'écrire une préface pour le tome 61-63.

Sur quoi travaillez-vous actuellement et quels sont vos projets ?

Sur le prochain album de la série 24 Heures consacré à la période de 1976 à 1978, par la lucarne qu'offrent les Artcars de BMW, décorées par Calder, Lichtenstein, Warhol et Stella. On ira ensuite jusqu'en 1980 dans le dernier album. Après 12 albums sur cette course qui couvrent pratiquement toute la période de 1923 à 1980, il sera bien temps de passer à autre chose.

Le 4 décembre 2023