Interview de Gurcan Gursel, à propos de Les Foot furieux

À l'occasion de la sortie de son tome 28 Double peine, découvrez les coulisses de la série Les Foot furieux, parue aux éditions Kennes, en lisant l'interview de son auteur, Gurcan Gursel.
Comment êtes-vous devenu auteur de bande dessinée ?
J'ai toujours eu un intérêt pour la bande dessinée depuis mon enfance. Cela m'a conduit à faire des études de graphisme à l'académie des Beaux-Arts d'Istanbul. Après mes études, j'ai travaillé pour le journal humoristique Girgir et pour la version turque du magazine américain MAD. J'ai commencé en écrivant de petites histoires et puis, j'ai décidé de créer ma propre bande dessinée.
Si votre nom est surtout associé aux BD sur le football, comme Les Foot furieux ou dernièrement Les Diables rouges que vous cosignez avec Daniel Bultreys, vous avez également été l'auteur de nombreuses BD coquines. Comment se sont imposés ces deux thèmes de prédilection ?
Ce sont deux thèmes qui s'apprécient beaucoup et qui sont très populaires. Sur conseil de ma maison d'édition de l'époque (Joker) en 1997, j'ai d'abord commencé la série Blagues coquines pour laquelle j'ai fait pas mal d'albums. Ensuite, j'ai continué avec la série Les Foot furieux à partir de 2004.
En avril 2004 sort le premier tome des Foot furieux, chez Joker Éditions. La série fête ses 20 ans, compte 28 albums et deux best-of, plus une déclinaison pour enfants/ados intitulée Les Foot furieux kids. Pensiez-vous, quand vous avez proposé votre premier tome à un éditeur, que la série connaitrait ce succès ?
J'étais convaincu que la série marcherait bien en tout cas, car à l'époque, il n'y avait encore aucun album dans le genre des Foot furieux et puis, le football fait partie des sports les plus populaires dans le monde et qui se pratique dans une grande majorité des pays. J'étais convaincu que si je parvenais à raconter le foot de la manière la plus drôle possible au travers d'une bande dessinée, la série aurait un succès avec des lecteurs fidèles à la série. C'est, d'ailleurs, ce qu'il s'est passé après les premiers tomes : il y avait eu beaucoup d'intérêt de la part des lecteurs lors des festivals et c'était la preuve que la série allait avoir un bon succès à l'avenir.
Les Foot furieux est une série humoristique sur le football, avec essentiellement des gags sur une page. Vous avez été l'unique auteur de la série pendant les 25 premiers tomes, hormis pour le numéro 14 où vous avez invité Roger Brunel et Ricardo Manhaes. Pourquoi ce changement pour le tome 14 et à partir du tome 26 ?
J'ai malheureusement eu quelques problèmes de santé lors du tome 14 et donc, pour que l'album puisse sortir à la date prévue, mon éditeur avait trouvé la solution de m'apporter l'aide de Roger Brunel et Ricardo Manhaes. À partir du tome 26, nous avons tout simplement voulu tester de nouvelles idées pour la série avec Daniel Bultreys.
Si nous prenons l'exemple du tome 10, publié en 2008, toutes les planches se déroulent sur le terrain de foot. Sur le dernier numéro, sorti en septembre 2024, un certain nombre de planches se déroulent en dehors du stade, et parfois le football ne sert plus que de prétexte au gag. Couplé au changement de scénariste à partir du numéro 26, faut-il se poser la question de savoir si la série vit ses derniers tomes par essoufflement ?
Ce n'est pas un essoufflement, mais une nouvelle idée que nous avons voulu tester. Nous ne voulions pas toujours rester au sein du stade de foot, mais nous voulions un peu en sortir, car le foot se vit aussi en dehors des stades de foot. Nous avons voulu apporter plus de richesses aux histoires de la série avec les dialogues, les gags, les décors, etc.
Le tome 21, publié en 2018, marque un changement d'éditeur. Joker Éditions cesse son activité en 2017 et son catalogue est transféré chez Kennes. Ce changement d'éditeur a-t-il eu un impact sur la série ?
Non, il n'y a pas eu d'impact. La série continue avec la même volonté et envie qu'au départ.
Numéro 25, vous êtes auteur solo, y compris pour la couleur. Numéro 26, vous signez le dessin et cosignez la couleur avec Ricardo Manhaes. Numéro 27, vous signez dessin et couleur en solo. Numéro 28, Ricardo Manhaes revient pour vous aider à la couleur. Comment se déroule ce travail du dessin et de la couleur depuis le numéro 25 ?
J'ai eu parfois besoin de l'aide de Ricardo pour terminer l'album dans les délais. Et puis, comme on s'est habitué à un rythme, Ricardo s'est chargé de toute la colorisation des derniers tomes.
Si nous reprenons l'exemple du tome 10, et que le lecteur le met à côté du tome 28, il est notable de voir que la colorisation a énormément évolué. Exit les applats, désormais ce sont des dégradés. Y a-t-il eu un passage de l'analogique au numérique au cours de la série ?
Oui, j'ai fait la couleur des dix premiers tomes à l'écoline, à la main direct. Et puis, nous sommes passés au digital. L'avantage de la colorisation au digital, c'est que quand on fait des erreurs de couleur sans s'en rendre compte, on peut tout de suite les corriger.
Jusqu'au numéro 25, comment travailliez-vous le scénario des gags et comment trouviez-vous les idées de gags ?
Comme je suis un fan de foot, il ne m'a jamais été très compliqué de trouver les gags. Mais je dois aussi préciser que je trouvais aussi pas mal de nouveaux gags en regardant les matches. J'en prenais notes pour les dessiner par la suite.
Pouvez-vous nous parler également des Foot furieux kids ? La série est scénarisée tour à tour par André Lebrun, Daniel Bultreys et vous-même. Y aura-t-il un tome 9 ?
Nous avons voulu viser davantage le public plus jeune des Foot furieux en créant la série Foot furieux kids avec des personnages récurrents et en racontant, en quelques pages, les aventures d'une équipe amateur. Oui, il y aura un tome 9 des Foot furieux kids qui sortira en 2025.
Comment travaillez-vous le dessin ?
Quand je dessine les planches, je commence de façon analogique, c'est-à-dire que je dessine d'abord au crayon, ensuite je fais l'encrage à la plume, au pinceau ou j'utilise un feutre. Enfin, quand vient le moment de la colorisation, auparavant, je faisais la couleur de manière analogique aussi, c'est-à-dire à la main direct, à l'écoline. Mais maintenant, je scanne les planches encrées et je fais la colorisation de manière digitale, à l'aide de mon ordinateur. Une fois que j'ai fait l'encrage de la planche, je détermine quelle couleur je vais utiliser à quel endroit et puis, je commence la colorisation. Si je dois faire la colorisation à la main, je m'applique encore plus pour ne pas faire d'erreurs.
Combien de temps vous demandait, jusqu'au numéro 25, un album, et combien vous en demande-t-il désormais quand vous signez le dessin uniquement et quand vous cosignez la couleur ?
Jusqu'au tome 25, il me fallait maximum 6 mois pour terminer un album. Depuis le tome 26, comme nous sommes 3, il nous faut environ 4 mois.
Avez-vous une anecdote relative à cet album ?
J'étais en train de dédicacer lors d'un festival. Un père est arrivé avec un sac rempli de BD dans ses mains et il a sorti les 25 tomes des Foot furieux devant moi. Il m'a dit : « Mon fils m'a demandé de lui acheter toute la série et il veut une dédicace pour chaque album, si c'est possible. » J'étais surpris au début, mais cela m'avait fait plaisir et donc, j'avais dédicacé les 25 tomes.
Sur quoi travaillez-vous actuellement et quels sont vos projets ?
Pour l'instant, je travaille sur le tome 9 des Foot furieux kids avec Daniel Bultreys et Ricardo Manhaes. L'année prochaine, nous souhaitons élaborer un nouveau projet de BD avec Daniel, mais nous sommes encore en discussions.
Le 17 novembre 2024