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Interview d'Iwan Lépingle, à propos de Submersion

Couverture de la BD Submersion

Découvrez les coulisses de la bande dessinée Submersion, parue aux éditions Sarbacane, en lisant l'interview de son auteur, Iwan Lépingle.

Comment êtes-vous devenu auteur de bande dessinée ?

Je suis autodidacte (j’ai fait des études de mathématiques), j’ai appris au fur et à mesure à maîtriser les outils de la BD : dessin, mise en scène/case, construction du scénario, couleurs… J’ai en premier lieu publié des albums en valeurs de gris avant de passer à une palette de couleurs plus large.

Quel a été le point de départ de Submersion ?

J’avais envie de montrer un lieu devenu inhabitable pour l’humain, un territoire rendu au sauvage. Et en parallèle de ce contexte, je souhaitais mettre en scène un personnage, Travis, le frère aîné, qui ne sait pas comment changer, qui reste accroché à des schémas anciens ou à son premier choix, alors qu’autour de lui les choses bougent. Travis ne sait pas comment habiter ce nouveau lieu, de la même façon qu’il ne sait pas faire le deuil de la mort de son jeune frère.

Avez-vous respecté les étapes traditionnelles de la réalisation d'une BD, à savoir synopsis, scénario, storyboard, crayonné, encrage, ou avez-vous shunté certaines étapes ?

J’ai respecté ces étapes à la fois parce que cela permet de maîtriser les différents éléments narratifs – le rythme, l’apport des informations qui doit être géré avec précision quand il s’agit d’un récit avec enquête, comme c’est le cas ici. Et cela permet également d’échanger avec l’éditeur à chaque étape, pour ajuster au mieux ces éléments.

Comment avez-vous travaillé le scénario de Submersion, qui reprend le schéma des polars et des thrillers ?

C’est mon quatrième scénario de ce type. Je commence à être à l’aise avec ce type de narration : la mise en place au départ de l’histoire, des fausses pistes, puis les révélations successives qui permettent de cerner le nœud de ce qu’il s’est déroulé dans le passé ou de la personne agissant dans le secret. En parallèle de ça, il est important pour moi de montrer aussi le quotidien des personnages, le travail, leurs relations pour en faire des personnages attachants auprès du lecteur, de la lectrice. Le scénario (ou la suite dialoguée) permet d’avoir une première vision de ce que sera le récit, mais c’est surtout le storyboard qui va montrer le rythme, comment les différentes parties s’articulent, etc. Mon storyboard doit être réalisé très vite, parce que je le retouche beaucoup avant d’avoir une version satisfaisante.

Comment avez-vous travaillé le dessin ?

Je dessine toujours sur papier, dans un format un peu plus grand que du A3 avec des rotrings. Je fais un crayonné que je gomme après coup. Puis mes planches sont scannées et je réalise les couleurs en numérique – avec Clip Studio Paint, qui est un logiciel assez semblable à Photoshop d’après ce qu’on m’a dit.

Sur la partie architecturale, vous réalisez des perspectives parfaites, laissant penser que vous avez utilisé un logiciel 3D. Qu'en est-il ?

Tout le dessin est réalisé sur papier, sans logiciel d’architecture – ainsi que les véhicules d’ailleurs. Je trace donc mes lignes de perspectives – ligne d’horizon, points de fuite, ligne de fuite – qui me donnent un canevas pour permettre d’y construire les éléments architecturaux et d’y insérer les personnages. Comme l’architecture brutaliste est très présente dans l’album, cela donne un sentiment assez froid – je voulais faire ressortir le contraste entre une architecture aux lignes pures mais presque déshumanisée et la reprise de la nature sur cette bande littorale.

Vous utilisez une colorisation très particulière, faite essentiellement d'aplat, pourquoi ce choix ?

Les derniers albums que j’avais réalisés étaient essentiellement en couleur directe avec de l’aquarelle. Je cherchais à avoir des couleurs beaucoup plus tenues, plus opaques. La colorisation numérique m’a permis cela. Les aplats donnent une grande lisibilité au dessin dans son ensemble, c’est, je pense, l’élément qui m’a guidé à faire ce choix. Je n’aime pas les dégradés proposés par les logiciels numériques, qui donnent, à mon sens, un côté froid et artificiel. Il y a malgré tout un outil de la palette graphique – comme un spray – que j’utilise pour donner un peu d’ombre aux collines et aux arrière-plans.

Combien de temps vous a demandé, au total, l'album ?

Un peu plus d’un an et demi, presque deux ans en comptant les premières recherches et les premières pistes de récits qui ont été abandonnés par la suite.

Avez-vous une anecdote relative à cet album ?

Rien qui me vienne à l’idée…

Sur quoi travaillez-vous actuellement et quels sont vos projets ?

Un ami a écrit un roman (un polar) l’année passée et il m’a proposé de l’adapter en BD. Nous montons le dossier de présentation pour les éditeurs.

Le 7 octobre 2024